La Ville de Riorges a inauguré ce samedi 27 avril, l’allée Albert Servajean, en hommage à ce résistant riorgeois qui fut déporté à Buchenwald.
Albert Servajean ( 1922-1995)
Né le 27 janvier 1922, Albert Servajean a vécu toute sa vie à Riorges depuis sa naissance jusqu'à son décès à l’âge de 73 ans. Il a grandi dans la ferme familiale située chemin de Beaucueil (aujourd’hui rue Pierre Dubreuil) jusqu’en 1948, avant de s’installer après son mariage chemin Martin puis en 1959 rue Albert Schweitzer.
L’armistice du 22 juin 1940 ayant supprimé le service militaire obligatoire, les chantiers de jeunesse furent créés comme une sorte de substitut. A partir de 1941 l’obligation est faite à tous les jeunes français en âge d’accomplir leurs obligations militaires d’y être incorporés pour un stage de 8 mois dans des camps près de la nature, à la manière du scoutisme, mais avec le volontariat en moins, pour accomplir des travaux d’intérêt général, notamment forestiers, dans une ambiance militaire. En réalité, il s’agissait d’inculquer les valeurs de la Révolution nationale prônée par le régime de Vichy. Aucune «politique » n’était tolérée dans les chantiers d’où l’absence de radio, de débats et autres moyens de communication qui même censurés auraient permis aux jeunes de suivre l’évolution de la guerre et de la politique du régime, et de se faire une opinion personnelle.
Albert Servajean est donc envoyé à Cormatin en Saône- et- Loire, entre Cluny et Tournus le 14 mars 1942. Sur son certificat de moralité et d’aptitude, il est écrit qu’il a fait preuve « d’honnêteté, de résistance à la fatigue et qu’il connait bien son métier de cultivateur ». Il rentre dans sa famille le 20 octobre 1942.
Après les précédentes réquisitions de travailleurs sous le régime de la Relève des prisonniers en Allemagne, le 16 février 1943, le gouvernement de Vichy instaure le Service du Travail Obligatoire pour tous les hommes de 20, 21, 22 ans réquisitionnés pour participer à l’effort de guerre allemand dans les usines d’armement en Allemagne. Comme des milliers de jeunes de son âge, Albert refuse cette situation et devient Réfractaire et pour ne pas se faire arrêter par la Feldgendarmerie, la Milice ou la Gestapo, il rejoint le Maquis.
Sa belle-sœur, qui habite dans le sud de la France près de Nîmes, le convainc de rejoindre le Maquis d’Aire de Cote dans les Cévennes près d’Alès, qu’il rejoint à pied et à vélo le 2 juin 1943. Il entre alors dans la clandestinité et la Résistance et fait partie d’un corps franc.
Le 1 er juillet 1943, le camp est attaqué par les parachutistes allemands après la trahison d’un ancien maquisard qui avait été chassé du groupe (voir encadré). 43 maquisards sont faits prisonniers dont Albert. Il est incarcéré 78 jours à la prison de Nîmes, ou il subit divers interrogatoires, puis transféré au camp d’internement de Compiègne le 18 septembre 1943.
Un mois plus tard, il prend la destination du camp de concentration de Buchenwald avec le matricule 31018, d’où il rejoint le « Kommando » de Schönebeck puis de Münchhausen pour travailler dans des usines qui fabriquent pour la firme Junkers, des pièces d’avions. Il est libéré par les Alliés le 11 avril 1945.
De retour à Riorges il participe en tant que membre à la section FNDIRP (Fédération des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes) de Roanne, puis est élu Adjoint au maire de Riorges en 1977.
Le maquis d’Aire de Cote (Cévennes)
Situé aux limites du Gard et de la Lozère, ce maquis, sous un camouflage d’exploitation forestière afin de ne pas attirer l’attention des Allemands est créé en janvier 1943 par un membre de L’Armée Secrète, René Rascalon, plombier à Nîmes, afin de cacher et de mettre en sécurité de jeunes Réfractaires de la région qui refusent de partir en Allemagne mais aussi de les préparer au combat.
Le premier village est à plus de 4 heures de marche. Le ravitaillement est difficile pour la vingtaine de jeunes maquisards en pleine force de l’âge ; le pays est pauvre et la seule ressource facile c’est la châtaigne, matin midi et soir.
Si tous veulent en découdre avec l’occupant, ils ne disposent que de quelques armes : pistolets et mousquetons de la Première guerre mondiale. Mais en quelques semaines, ce discret et calme refuge est auréolé d’une renommée tapageuse issue d’une rumeur infondée. L’effectif augmente très vite, les Réfractaires au STO arrivent de toute part, mais quelle déception pour ceux qui croyaient trouver un camp retranché avec radio, armements anti aérien et ne découvrent qu’un modeste refuge forestier surpeuplé et mal ravitaillé !
1er juillet 1943 : l’attaque !
Les « racontars » qui courent sur ce maquis inquiètent l’ennemi ; le 30 juin les responsables apprennent par un renseignement anonyme que 600 gardes mobiles avec des forces allemandes de soutien seront en route d’ici une semaine pour « nettoyer le secteur » ! Il faut donc évacuer rapidement le camp. Les hommes sont informés de l’imminence d’un départ ; la fin de l’après- midi est consacrée aux préparatifs. A 21 heures les hommes sont prêts et regroupés, quand soudain des rafales d’armes automatiques crépitent dans tous les sens : une compagnie allemande puissamment armée a encerclé le camp. Attaqués par surprise et sans moyen de défense, 3 maquisards sont tués et 15 sont blessés, dont 4 meurent faute de soins ; 43 maquisards sont faits prisonniers et déportés dans les camps de concentration, ou 22 d’entre eux sont morts et 19 en sont revenus dont Albert Servajean.
On saura plus tard que c’est un ancien du maquis qui avait été chassé qui les a trahis en donnant une fausse information et guidé les Allemands.